Crise de la Corona : Test pour les organisations d’agriculteurs africains
Un texte de Fatma Bouchareb et Jan Pusdrowski
Un texte de Fatma Bouchareb et Jan Pusdrowski
L’agriculture mondiale à petite échelle, et surtout en Afrique, est soumise à une forte pres-sion. L’absence de stratégies fiables pour la promotion de l’agriculture au Burkina Faso ag-grave le problème, car il n’existe pas de système de sécurité sociale pour les producteurs agricoles ni de services d’assurance pour les professions agricoles. La fermeture des fron-tières et le confinement initial a fortement limité l’activité du marché. De nombreux produc-teurs ont déjà beaucoup perdu à cause du ralentissement économique, car ils n’ont plus de capital à réinvestir. Ils sont donc contraints d’abandonner leur entreprise et de nombreux exploitants ainsi que leur main-d’œuvre se trouvent désormais au chômage. Tout cela met gravement en danger la réalisation des objectifs du SDG2, et dans de nombreux cas, il y a un risque de rechute dans l’agriculture de subsistance.
Le Réseau des Organisations Paysannes pour une Synergie d’Actions au Burkina Faso (ROPSA-B) réagit à la crise de la Covid-19 en adressant des demandes concrètes au gouver-nement. Jusqu’à présent, le gouvernement a pris des mesures pour soutenir les commer-çant(e)s : la distribution de denrées alimentaires (riz, maïs, sorgho, huile) et un budget de 5 milliards de XOF pour soutenir les commerçant(e)s du secteur informel sont des mesures qui ont été adoptées. Des négociations ont également été menées avec les banques sur le rem-boursement des prêts, de même, la possibilité de différer les prêts en cours est introduite.
Les agriculteurs ont besoin de soutien
Le ROPSA-B, d’autre part, appelle à soutenir les producteurs/productrices en mettant à dis-position des fonds et des moyens pour que les filières agroalimentaires restent fonction-nelles afin que l’approvisionnement alimentaire de la population ne soit pas compromis. En outre, la fourniture de nourriture aux producteurs qui ont tout perdu à la suite des mesures et le financement d’activités visant à renforcer la résilience des entreprises maraîchères font partie des demandes du ROPSA-B. Le ROPSA fait également campagne pour la création d’un fonds de soutien aux projets des maraîchers/maraichères afin d’assurer leur formation continue.
Plus de poids – Conférence de presse publique du ROPSA-B
Le 8 septembre 2020, le ROPSA a tenu une conférence de presse à Ouagadougou avec cinq membres du conseil d’administration dans le but est d’informer le gouvernement sur les conséquences des mesures restrictives de la Covid-19 pour les producteurs et d’obtenir leur soutien.
La conférence de presse a été préparée par un groupe de travail composé de membres du conseil d’administration et avec le soutien d’un consultant en L&A. Préalablement à la réu-nion, trois ateliers ont servi à préparer le groupe de travail. Ces ateliers ont eu lieu sur les thèmes suivants : (1) la collecte de données sur l’impact de la Covid-19 dans le secteur agri-cole au Burkina Faso, (2) la préparation des propositions et recommandations à soumettre au gouvernement, et (après que l’opinion sur la prévention actuelle du SRAS-COV-2 ait été rédigée sur cette base) la (3) validation et la finalisation du document de position.
Lors de la conférence de presse, le ROPSA-B a défendu plusieurs positions. Ils ont souligné que les mesures gouvernementales de protection contre la Covid-19 et sa propagation ont un impact majeur sur les activités agricoles au Burkina Faso. Cette situation a entraîné un ef-fondrement des marchés de vente de divers produits agricoles, à la suite duquel les producteurs ont perdu plusieurs milliards de francs CFA parce que les produits ne pouvaient pas être vendus et que les marchés étaient inaccessibles. Pour minimiser les pertes, les producteurs sont souvent obligés de vendre leurs produits à bas prix. En outre, les membres du Conseil se sont plaints de lacunes dans la mise en œuvre des mesures nationales de diffusion des moyens de pro-duction agricole. Ils ont cité la mauvaise qualité des réseaux de communication comme l’une des principales faiblesses de la mise en œuvre, qui ne permettait pas aux producteurs, en particulier dans les zones rurales, d’obtenir des informations. Ils se sont également plaints de l’absence de représentants élus des chambres régionales d’agriculture dans la planification de ces mesures.
Dans ce cadre, le gouvernement a été invité à identifier les responsabilités afin de mettre en place des mécanismes de financement adaptés aux spécificités des secteurs agricoles. L’ob-jectif est de relancer les activités, par exemple en réduisant les taux d’intérêt des prêts agri-coles et en créant des entrepôts équipés pour le stockage des produits. Le ROPSA-B a éga-lement demandé que les différentes organisations, à savoir la Chambre nationale d’agricul-ture (CNA), les Chambres régionales d’agriculture (CRA) et les organisations professionnelles agricoles, assument la responsabilité de la diffusion des moyens de production et puissent ainsi gérer et superviser ces processus. Les CNA et les CRA devraient également être dotées des ressources humaines et financières nécessaires. Selon le ROPSA, ces mesures et une meilleure coordination sont susceptibles de réduire les difficultés rencontrées par les pro-ducteurs ruraux.
Impact de la conférence de presse
Au total, 25 représentants des médias ont rendu compte de la conférence. Il s’agit notam-ment des trois stations de radio les plus écoutées au Burkina Faso : Savane FM, Oméga FM et la station nationale Radio Burkina Faso. La télévision nationale a également diffusé des reportages sur les chaînes BF1, TNB et SAVANE TV. Tous ces organes de presse importants diffusent l’événement. Sur la base des parts d’audience moyenne de ces chaînes, on peut estimer une audience de téléspectateurs et d’auditeurs de près de neuf millions (9 000 000) de personnes. En outre, les principaux journaux locaux ont également rendu compte de l’événement (en ligne et hors ligne). Par le biais de cette conférence de presse, le ROPSA-B a été invité à apparaître dans d’autres programmes de télévision et de radio, tels que Wat Fm le 5 juillet et le 10 août 2020, 3TV le 10 août 2020, Impact TV le 22 août 2020. D’autres entretiens et apparitions sont prévus.
Rencontre avec le Président
Le 10 septembre 2020, le ROPSA-B a sollicité par courrier une audience avec le Président du Burkina-Faso, M. Roch Marc Kaboré. Le 28 septembre, le ROPSA-B a été invité à rencontrer le conseiller spécial du Président pour le développement rural. Les discussions ont porté principalement sur la gestion de la crise de l’État à l’époque de la Covid-19, en se concen-trant sur le secteur agricole. Ils ont discuté de la nécessité d’une réforme de la politique agricole et d’un réexamen des promesses faites par le Président, telles que la facilitation de l’accès à des moyens de production de haute qualité à des prix abordables. Le ROPSA-B a également préconisé l’organisation de journées nationales des agriculteurs tous les deux ans et l’amélioration des capacités des chambres régionales d’agriculture (CRA) et de la chambre nationale d’agriculture (CNA) en matière d’accueil et d’enregistrement des exploi-tations. Le conseiller spécial a affirmé que le Président du Burkina Faso avait donné instruc-tion au ministre des finances de mettre des fonds à disposition pour soutenir la reprise éco-nomique des agriculteurs et des entreprises de transformation des produits agricoles locaux. Il a donc suggéré que le ROPSA-B envoie un document informatif au Président mentionnant les pertes subies par les agriculteurs et les entreprises de transformation des produits agri-coles et propose un mécanisme de soutien souhaité.
Créer de la notoriété – la représentation des intérêts fonctionne !
Enfin, le conseiller spécial a salué l’initiative du ROPSA-B d’entamer des pourparlers avec les plus hautes autorités afin de défendre les intérêts des petits agriculteurs. Un signal impor-tant pour les organisations d’agriculteurs. Il a promis de faire rapport au Président et attend les propositions du ROPSA-B pour soutenir les acteurs du secteur agricole qui sont affectés négativement sur le plan économique par les mesures Covid-19.
La pandémie mondiale a également entraîné un confinement et des restrictions de la vie écono-mique et publique dans de nombreux pays africains. Au Kenya, le gouvernement avait imposé des mesures pour limiter la propagation du virus. Un couvre-feu entre 21 heures et 4 heures du matin est resté en vigueur jusqu’à aujourd’hui. Les frontières extérieures ont également été fermées, mais les voyages aériens internationaux sont à nouveau possibles, toutefois, les voyageurs doivent pouvoir présenter un test PCR négatif à l’entrée.
Les conséquences de la crise de la Covid-19 sont difficiles à évaluer. Ce qui est clair, cependant, c’est que les restrictions ont eu un impact direct sur l’activité du marché et donc aussi sur l’agricul-ture.
KENAFF et COVID-19
La Kenya National Farmers’ Federation (KENAFF) est l’organisation faîtière des agriculteurs au Ke-nya. La KENAFF a pour mandat de représenter, d’articuler, de protéger et de promouvoir les inté-rêts des agriculteurs et d’offrir des services pertinents à ses membres.
La KENAFF agit par le biais du lobbying et du plaidoyer (L&P) et de la représentation des intérêts, par des mesures politiques et par le renforcement des capacités. Au cours des six dernières an-nées, la KENAFF a été confrontée à des défis internes et externes qui ont limité sa capacité à repré-senter ses membres et à leur fournir des services. Avec le soutien de partenaires internationaux, KENAFF a réalisé des progrès remarquables au cours des deux ou trois dernières années. L’Andreas Hermes Akademie (AHA) accompagne la KENAFF depuis de nombreuses années.
Le SRAS-CoV-2 a ralenti les activités et les efforts de KENAFF pour 2020. Ainsi, les premières élec-tions depuis 5 ans ont dû être interrompues et l’élan qui vient d’être enregistré est menacé de s’essouffler. Cependant, KENAFF a pu poursuivre son travail dans le domaine du L&P par le biais de la radio, de la télévision ou des journaux et elle a également mis en place un système USSD. Les systèmes USSD (en anglais : Unstructured Supplementary Service Data) sont des commandes de service et de contrôle dans le réseau de téléphonie mobile. Les codes USSD fonctionnent de la même manière avec tout type de téléphone portable et l’accès au système USSD de KENAFF peut se faire avec le plus simple des téléphones comme de coutume avec l’USSD. KENAFF utilise le sys-tème pour diffuser des informations sur le SRAS-CoV-2, l’agriculture, la météo et les informations sur le marché. Le système s’est développé avec succès.
Le système USSD pour les agriculteurs au Kenya
En développant et en mettant en place un code spécial USSD, lKENAFF est désormais en mesure d’atteindre ses membres et ses agriculteurs, car le système est ouvert à tous.
KENAFF a signé plusieurs protocoles d’accord avec diverses parties prenantes pour l’utilisation de données provenant de tiers, par exemple Safaricom PLC pour la fourniture de services, Kenya Agri-cultural Observatory Platform (KAOP) pour l’échange de données météorologiques jusqu’aux ni-veaux départementaux, Kenya Agricultural and Livestock Research Organization (KALRO) pour les résultats de recherche et les informations à échanger avec les agriculteurs, et l’Agriculture Informa-tion Resource Centre du ministère de l’agriculture, de l’élevage, des pêches et des coopératives pour les informations techniques.
Le système est désormais accessible via le code USSD *501# dans le réseau Safaricom. Cette plate-forme est un outil important pour KENAFF, car il peut également envoyer des notificationsdirecte-ment à tous les utilisateurs enregistrés. La plateforme elle-même augmente la visibilité de lKENAFF auprès de ses membres et des agriculteurs qui ne sont pas encore membres. D’ici 2 ou 3 ans, on s’attend à ce que la plateforme soit amortie par KENAFF qui s’adresse à la fois aux prestataires de moyens de production agricoles et aux prestataires de services pour le secteur agricole, ces der-niers souhaitent évidemment utiliser la source de données de la plateforme.
L’objectif spécifique était de créer et de gérer un code national USSD pour la communication avec les agriculteurs sur une large panoplie de sujets, notamment le confinement et la gestionde la crise Covid-19, les services de soutien aux agriculteurs, les services de conseil technique et les informa-tions et renseignements sur les marchés.
le 21.10.2020, 21453 agriculteurs au total s’étaient inscrits. Dans le système USSD, les agriculteurs sont répartis dans différentes filières agroalimentaires. Lors de leur inscription, il leur a été deman-dé d’indiquer leur filière prioritaire afin qu’ils aient un meilleur accès à l’information d’une part et que KENAFF puisse également utiliser cette catégorisation pour distribuer l’information de haut en bas à tous les utilisateurs (ou à des groupes d’utilisateurs spécifiques) d’autre part.
N° | Filières agroalimentaires (WSK) | Agriculteurs inscrits |
1 | Producteurs laitiers | 7316 |
2 | Éleveurs de volaille | 3787 |
3 | Haricots WSK | 1739 |
4 | Maïs WSK | 1420 |
5 | Éleveurs de chèvres | 1301 |
La plateforme USSD de la KENAFF propose un choix de 50 filières agroalimentaires. Il s’agit notam-ment de filières agroalimentaires identifiées par les localités comme des filières agroalimentaires prioritaires dans la stratégie pour la transformation et pour la croissance du secteur agricole (ASTGS, 2019-2029), ainsi que des filières agroalimentaires qui ne sont pas énumérées dans le document.